vendredi 11 mai 2012

Dark Shadows : Burton se cherche encore


Tim Burton n’est plus l’ombre de lui-même. Après une série de films consensuels qui ne le font nullement évoluer en tant que cinéaste, il continue à perdre son temps avec «Dark Shadows», l’adaptation cinématographique d’une série à succès. Si l’on retrouve tout ce qui fait sa marque de commerce, sa verve fait cruellement défaut.

Depuis «Twilight» (et même avant), on sait que les vampires aiment à la vie, à la mort. Même ceux qui ont disparu depuis deux siècles et qui réapparaissent en 1972 pour aider leurs descendants. C’est ce qui arrive à Barnabas Collins (Johnny Depp) qui est accueilli dans son ancien manoir par les membres de sa famille lointaine. Mais lorsque son chemin recroise celui de son ennemie jurée (une sorcière maléfique campée par Eva Green), c’est la reprise des hostilités qui risque de mettre le petit village à feu et à sang…

Tim Burton a déjà été un grand cinéaste. Il a agencé gothisme et Hollywood, réalisant son lot de films cultes tels «Edward Scissorhands» et «Ed Wood» tout en créant un style qui lui est propre et en lançant la carrière de ses illustres collaborateurs (Johnny Depp, le compositeur Danny Elfman). Mais depuis plusieurs années, ses longs métrages manquent d’envergure. Même si quelques titres demeurent de qualité («Corpse Bride» et «Big Fish» par exemple), on le sent trop souvent sur le pilote automatique, fabricant des gros joujoux d’une fadeur abyssale tels «Charlie and the Chocolate Factory», «Sweeney Tood» et «Alice in Wonderland». Pourtant, la plupart des critiques de cinéma vivent dans le passé, le mettant encore sur un piédestal.

L’histoire se répète avec «Dark Shadows» qui n’est pas catastrophique, mais qui est loin d’être extraordinaire. À la base, il s’agit d’une vieille émission de télévision qui a remporté un vif succès entre 1966 et 1971. Malgré ses moyens réduits et une qualité technique très discutable, la série se prenait au sérieux. Tout le contraire de cette transposition qui n’a certainement pas manqué d’argent. On sent – comme toujours chez son auteur – un grand soin apporté à la photographie, à la direction artistique, aux costumes, aux maquillages et aux effets spéciaux, qui n’ont pas besoin de 3D pour impressionner. C’est magnifique à regarder et le résultat ne se prend nullement au sérieux. À quoi bon respecter le passé si on peut le passer au rouleau compresseur pour faire rire au passage? S’en échappe un effet «Mars Attacks !» qui est encore moins élaboré que ce gentil hommage pas toujours au point à Ed Wood.

Sauf qu’ici, les éléments comiques prennent difficilement. Il y a bien quelques gags qui font sourire, des situations joyeusement grotesques (la scène de copulation entre Depp et Green) et une dernière demi-heure complètement disjonctée. Mais il y a surtout une histoire qui s’étire, une introduction péniblement ennuyante et un manque flagrant d’audace. Au lieu de se retrouver devant une variation de «Beetlejuice» ou «The Addams Family», ce sont les éternels clichés des «Visiteurs» qui s’affichent avec une multitude de gags sur l’homme d’une autre époque qui est incapable de bien s’acclimater à la modernité. C’est dommage parce que le potentiel dramatique y était. Une intrigue bien secondaire sur la jeune femme maudite du héros (elle est interprétée par la ravissante Bella Heathcote) vient tirer une corde sensible. Elle est cependant bien mal développée et incorporée à l’ensemble.

«Dark Shadows» est donc tout au plus un divertissement de base à prendre au premier degré, qui se plaît à se moquer des éléments mélodramatiques que l’on retrouve dans tous les «Twilight» de ce monde. Il n’est donc pas surprenant de voir autant de bons comédiens (comme Michelle Pfeiffer, Helena Bonham Carter, Jackie Earle Haley, Jonny Lee Miller et Chloë Grace Moretz) s'éclater dans des rôles tordus et libératoires. C’est seulement dommage que le résultat final ne leur rend pas davantage justice.

2,5/5 

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